Ressources psychologiques pour les femmes de réservistes en Israël: aider les enfants à traverser la guerre avec confiance
- Jessica Tavivian
- il y a 3 jours
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 1 jour

Après plus de deux ans de guerre, une lueur d’espoir commence à poindre, mais la réalité reste complexe. Cette situation pèse sur chacun d’entre nous — adultes comme enfants — et il est normal de se sentir parfois dépassée. Vous n’êtes pas seule : des ressources existent pour accompagner vos enfants et vous-même pendant cette période particulière.
Le stress chez les enfants pendant l’absence d’un parent réserviste
Les enfants ne comprennent pas la guerre de la même manière selon leur âge, mais tous la ressentent à travers les émotions et les comportements des adultes qui les entourent. Les plus petits expriment souvent leur stress par des troubles du sommeil, des pleurs, de l’irritabilité, des régressions (succion du pouce, pipi au lit, besoin d’être portés), une perte d’appétit ou des maladies répétées. Les enfants d’âge scolaire peuvent manifester leur anxiété par des peurs de séparation, du bruit ou de l’obscurité, une dépendance accrue ou, au contraire, un repli silencieux. Les plus grands, eux, perçoivent davantage la réalité et ressentent tristesse, colère, culpabilité ou impuissance face à l’absence du parent réserviste.
Ces réactions varient selon le soutien parental, la stabilité du cadre de vie et les expériences vécues (alertes, déplacements, séparations). Votre rôle n’est pas d’empêcher ces réactions, mais de les accueillir avec compréhension et présence. Les émotions d’un enfant ne sont pas un problème à résoudre, mais un message à écouter.
Créer un environnement sécurisant
Dans l’incertitude, la stabilité du quotidien devient un pilier. La régularité nourrit le sentiment de sécurité, essentiel au développement affectif. Essayez de conserver des horaires réguliers pour le coucher et les repas, et de prévenir les changements à l’avance (“Aujourd’hui, c’est mamie qui viendra te chercher”). Les rituels — une histoire, une chanson, un câlin du soir — sont autant de repères rassurants.
Le contact bienveillant apaise souvent avant même les mots. Une main posée sur l’épaule, un câlin, ou simplement le fait de se mettre à leur hauteur permet à l’enfant de sentir votre présence. Un geste accompagné d’une phrase douce — “Je suis là, tu es en sécurité” — suffit souvent à ancrer un sentiment de calme.
Aider l’enfant à comprendre et exprimer ses émotions
Les enfants ont besoin de sentir que leurs émotions ont le droit d’exister. Valider leurs émotions permet à l’enfant de se sentir compris, ce qui réduit la détresse et favorise la régulation affective. Écoutez sans minimiser, juger ni interrompre. Nommer ce que vous observez — “Tu sembles triste”, “Je vois que tu es en colère” — leur permet de mieux comprendre ce qu’ils vivent. Ces mots simples valident leur ressenti et les aident à réguler ce qu’ils éprouvent. Évitez de minimiser en disant par exemple: “Ne pleure pas”, “Ce n’est rien”. Mais dire plutôt “je vois que c’est difficile pour toi” ouvre un espace de confiance. L’écoute sincère vaut plus qu’une solution rapide.
Pour les plus petits, les livres peuvent être de précieux alliés pour apprendre à reconnaître les émotions et à en parler. (voir rubrique ci-dessous) Quand les mots manquent, laissez place à la créativité : le dessin, le jeu, la musique ou la pâte à modeler deviennent des langages émotionnels à part entière. Il n’est pas nécessaire d’interpréter leurs créations — l’essentiel est de leur permettre de s’exprimer librement. Encouragez des moments de respiration lente, de mouvement, de yoga ou de promenade. Un corps apaisé envoie au cerveau le message que le danger est passé

Nourrir la résilience et le lien familial
Les enfants deviennent plus résilients lorsqu’ils se sentent compétents et reliés à leur famille, même à distance. Soulignez leurs efforts et leurs gestes de solidarité : “Tu as été très patient”, “Tu as bien pris soin de ta sœur.” Ces mots renforcent leur estime de soi et leur sentiment d’efficacité.
Maintenir un lien symbolique avec le parent réserviste est un puissant facteur de réassurance. Les enfants peuvent exprimer leur affection et leur présence à travers de petits rituels: faire un dessin chaque jour pour papa et le ranger dans une boîte spéciale, tenir un carnet commun, écouter un message vocal ou regarder une photo ensemble, ou encore écrire quelques lignes à lire plus tard, au moment des retrouvailles. Ces gestes simples maintiennent le fil invisible du lien, même à distance.
Créer des projets positifs — planter une graine, fabriquer un album pour papa, tenir un petit journal du lien — nourrit l’espoir et la continuité affective. Leur rappeler que cette période est temporaire, que la famille reste unie, même si un parent est loin.
Offrir des responsabilités adaptées à leur âge est aussi une manière précieuse de les rassurer. Participer à la vie quotidienne ou savoir quoi faire en cas d’alerte leur donne un sentiment de contrôle sur la situation. Vous pouvez, par exemple, décider ensemble au préalable que le plus grand ferme la porte de l’abri, que le moyen allume la lumière, et que le plus petit chante une chanson ou apporte un jeu. Ces petits rôles donnent du sens et de la confiance — ils transforment l’attente en action.
Limitez autant que possible l’exposition aux informations anxiogènes. Évitez les journaux, les conversations sur la guerre, et préférez des mots simples et vrais : “Papa est parti aider, il reviendra quand ce sera possible.” “Les adultes s’occupent de la sécurité.”
Les relations bienveillantes avec d’autres enfants ou adultes de confiance (grands-parents, enseignants) soutiennent aussi leur équilibre émotionnel. Encouragez les jeux, les rires, et les moments partagés à l’extérieur dès que possible.
Prendre soin de soi en tant que parent
Les enfants absorbent nos émotions. Prendre soin de soi, c’est aussi prendre soin d’eux. Autorisez-vous à reconnaître vos besoins : repos, soutien, calme. Parlez à un proche, ou à un professionnel, si le poids devient trop lourd.
Partager vos émotions, avec des mots simples — “Moi aussi, il me manque” — aide l’enfant à comprendre que la tristesse ou la peur ne sont pas des faiblesses, mais des expériences humaines normales.
Demander de l’aide n’est pas un signe d’échec, mais un acte de soin et de prévention. Un pédopsychologue peut aider l’enfant à exprimer ses émotions, à retrouver un équilibre, et à soutenir le parent dans cette démarche.
Consultez si, pendant plusieurs semaines, vous observez chez votre enfant:
des changements marqués du comportement (agressivité, retrait, mutisme)
des troubles persistants du sommeil ou de l’alimentation
des régressions importantes (perte de la propreté, peur intense de séparation)
des plaintes physiques répétées (maux de ventre, de tête, nausées)
une tristesse durable, une perte d’intérêt ou une culpabilité excessive
des jeux ou dessins centrés sur la peur ou le danger
Conclusion: vous êtes la base de sécurité de vos enfants
Dans l’incertitude, votre présence aimante reste le repère le plus solide pour vos enfants. Votre regard, votre voix, votre chaleur sont pour eux une ancre, la preuve que le monde peut rester sûr malgré tout. Nul besoin d’être parfaite : être simplement présente et authentique suffit. Un câlin, un regard, un “je te comprends” valent souvent plus qu’un long discours.
Vous n’êtes pas seules. Faire partie d’une communauté de femmes vivant les mêmes défis — se soutenir, partager, se relayer — est aussi un acte de soin. Les enfants apprennent la sécurité en voyant leurs parents trouver du soutien.
Pour cette raison, j’ai ouvert un groupe de soutien gratuit pour les femmes francophones de soldats réservistes : Un espace d’écoute, d’entraide et de douceur, où chacune soutient et est soutenue.

Rubrique – Livres pour les petits
Pour accompagner les enfants dans la découverte et la compréhension de leurs émotions, voici une sélection de livres utiles.
Mes émotions, Gaston la licorne – Aurélie Chien Chow Chine
Dans mon petit cœur – Jo Witek
La couleur des émotions – Anna Llenas
Dans moi, il y a tout ça – Astrid Desbordes et Pauline Martin
Le loup qui apprivoisait ses émotions – Orianne Lallemand et Éléonore Thuillier
Et le lapin m’a écouté – Cori Doerrfeld
Les émotions et les sentiments – Docteur Catherine Dolto
Mes p’tits pourquoi – Les émotions – Gallimard Jeunesse

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